jeudi 3 janvier 2019

Les Angoissés


Les angoissés



Est-ce la peur de vivre et de mourir qui pousse certains hommes à cheminer vers la Philosophie et les grands espaces spirituels où l'on peut chevaucher le Mystère à souhait sans craindre rien ni personne d'autre que soi-même ?

       Est-ce l'angoisse existentielle ? Qui aiguise mon âme comme la meule moule la lame mais qui seule me meut ?

      Que serais-je sans toi, angoisse existentielle qui vint à ma rencontre, que serais-je sans toi qu'un imbécile heureux ?

       Heureusement, tu es là, pour faire de moi un esprit chagriné. Qui ne croit plus en rien (poil au rein ?). Ne s'attachant à aucune valeur, comme un pauvre diable qui croyait croire à toutes ces choses, et qui s'aperçoit, sauvé par le gong de la lucidité, qu'il n'y croit pas réellement. Ces choses, voiture-téléphone-portable-lave-vaisselle-lave-linge-barbecue-canapé-en-cuir-cuisine-amovible-portail-automatique-de-caractère-chose-pliante-store-enrouleur… sont en réalité des leurres, au même titre que la morale, la religion ou la politique.

       Ou plutôt non, ce ne sont pas des leurres, toutes ces choses sont véritablement adorables. Le leurre, c'est la publicité beurrée tout autour, qui donne la nausée à celui ne pouvant pas la regarder parce qu'il est empêtré dans son angoisse existentielle, parfois jusqu'au coup de garce, sans pouvoir s'en sortir, se posant contre son gré des tas de questions sur le sens de la vie et l'utilité réelle de toutes ces choses sans doute finalement inutiles qu'il voit à la télévision, entre deux coupures, et qu'il adorerait en fin de compte posséder, mais ne le peut pas, car il est tout simplement improductif, obsolète, ou qui plus est, chômeur. 

Ne pouvant plus agir efficacement sur les choses et les êtres qui l'entourent afin de satisfaire les lois de la nature qui le pousse implacablement au maintien de son homéostasie naturelle, il n'a que cette angoisse existentielle pour le rattacher à la vie, lui donner une identité parmi les hommes.

Le malheureux a trop de cartes dans son je, trop de sens, de facettes. Il est trop humain, trop peut-être-il-faut-voir-je-pense-que-je-vais-y-réfléchir-si-vous-m'en-donnez-le-temps.

Pas assez oui-tout-de-suite. Trop étranger déjà à l'Homo-Automaticus, annonçant depuis quelques décennies avec une arrogance toute technocratique l'avènement hypothétique d'un Age Numérique composé exclusivement de 0 sans visage et de 1 sans profil, qui espérons-le, sera étouffé dans le neuf avant l'an d'Emile XXIII…




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